Le 16 février 2015, la Cour de cassation a rendu un avis, sollicité par le juge des référés du Tribunal d’instance du 17ème arrondissement de Paris, concernant l’application de la loi ALUR et plus précisément l’article 27 de cette loi permettant au juge d’accorder au locataire un délai maximal de trois ans pour régler sa dette.
Avant la Loi ALUR, le délai de paiement maximal pouvant être accordé était de deux ans, en application de l’article 1244-1 du Code civil.
La question posée à la Cour de cassation était de savoir si l’article 27 de la loi ALUR pouvait s’appliquer aux baux conclus avant son entrée en vigueur.
La question faisait débat. La Cour de cassation apporte une réponse claire et sans équivoque : les juges peuvent accorder des délais de paiement allant jusqu’à trois ans, sur le fondement de l’article 27 de la loi ALUR, aux baux en cours à la date de son entrée en vigueur.
Cette disposition de la Loi ALUR est donc d’application immédiate. L’impact est important en pratique car les demandes de suspension de la clause résolutoire du bail et de délais de paiement de la dette locative sont constamment portées à l’attention du juge afin d’éviter l’expulsion au locataire défendu.
Il convient de rappeler cependant que de tels délais ne sont accordés qu’au locataire de bonne foi prouvant avoir les facultés de payer le loyer courant et une somme en sus, en règlement de sa dette locative.
Le délai de trois ans maximal est laissé à l’appréciation du juge et les débats sur le délai deviendront peut-être plus âpres du fait de cet allongement possible.
En effet, il ne faut pas négliger l’impact de l’accord d’un délai si long pour le bailleur qui peut s’être retrouvé en difficulté du fait du non paiement du loyer par son locataire et se voit, par une telle décision, contraint de laisser son bien à la personne qui l’a mise en difficulté et d’être payé sur trois ans. Cependant, cet échéancier est peut-être le meilleur moyen pour le bailleur de recouvrer son dû : l’exigence du paiement en une seule fois d’une somme importante auprès d’une personne peu solvable se heurte bien souvent à l’impossibilité d’exécution sauf à travers diverses saisies peu fructueuses et coûteuses…
Un tel délai ne saurait, toutefois, s’appliquer, à mon sens, à des sommes peu élevées sans préjudicier trop grandement aux intérêts du bailleur, mais alors si la dette est élevée, pourra-t-on considérer le locataire comme de bonne foi ?
Le travail de conviction de l’avocat sera, plus que jamais, de mise sur la justification de la demande d’un tel délai.
Lien vers l’avis de la Cour de cassation du 16 février 2015 :
https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/avis_15/integralite_avis_classes_annees_239/2015_6994/2015_14_7039/15002_16_31169.html